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Tous englués. N°436.

Écrit par sur 22 juillet 2010

La Chronique suit son petit bonhomme de chemin alors que je suis en congé. Il ne me serait donc nullement utile de me justifier si, les journées étant si chaudes, je décidais de sauter quelques rendez-vous sur la toile. Mais le comble! le plus drôle c’est qu’il me vient l’envie de raconter mes dernières heures de travail qui remontent quand même à deux semaines.

Eh bien voilà: un gros appel d’offres d’achat public de bitume -dont j’ai la charge- a été classé infructueux par manque de candidats. Bon d’accord les candidats sont peu nombreux en général dans ce secteur d’activité, ce sont Shell et Total. Donc, de ces deux mammouths qui se partagent le territoire national et plus, aucun des deux n’a jugé bon de répondre à cet appel d’offre d’une durée de quatre ans. Zéro! Pas de candidat! Personne! Evidemment la question qui vient immédiatement à l’esprit est celle-ci: ces sociétés se sont-elles entendues pour ne pas répondre? Parce que cela ne s’est jamais vu qu’elles s’abstiennent ainsi sur une telle consultation.

Evidemment ce n’est pas demain que l’on aura le début d’une réponse sur d’éventuels conciliabules… Toujours est-il que c’est louche! Bon j’emploie ici louche non pas pour insinuer une quelconque entente illicite, non. Mais pour ce que ça dit: ces géants de la pétrochimie ne comptent plus s’engager sur une durée longue ni même sur un prix fixé à l’avance quand bien même existe le recours habituel à la révision de prix indexés sur les cours du bitume. Voilà c’est une info de la mi-juillet que je ne pouvais garder pour moi sous le soleil. Bien sûr on peut invoquer la crise économique et les ré-ajustements du prix du pétrole qui ne peuvent qu’advenir. Mais là j’ai des doutes, non ce genre d’hypothèse ne tient pas, car les variations, à la hausse ou à la baisse, ces empires savent les répercuter d’une manière ou d’une autre.

Bref, c’est louche parce que ça cache un truc. Du coup l’idée qui surgit est celle qui considère qu’il est probable que nous avons atteint le point de production maximum de pétrole, et que la production de pétrole ne saurait désormais que décroître, et sans doute rapidement. Bref, la perspective de la « fin du pétrole » ni plus ni moins!

J’en parle sans preuve, je signale. Mais envisager que le pétrole viendra à manquer, et qu’en conséquence un ré-ajustement mondial est en préparation, devrait aller de soi. Sans même avoir étudié la question c’est dire. Pour cela il suffit de se voir tel que l’on est devenu : dès lors qu’il sera reconnu que l’on approche des limites des ressources pétrolières, dès lors que la demande excédera structurellement l’offre, le prix du pétrole ne peut qu’augmenter fortement. Même si ça prospecte aux quatre coins du monde, sortir du pétrole à peu de frais et en grande quantité c’est pas gagné! les perspectives s’avèrent plutôt sombres.

Pour examiner les besoins, exerçons notre attention. Pas la peine d’être l’expert économique des plateaux télé pour voir que toute notre économie et sa technologie repose sur l’addiction au pétrole. Télézapping ou pas l’on sait tous que les ordinateurs, panneaux solaires, appareils ménagers et tout et tout et même T-shirts à deux euros en vente à Super U sont produits à un bout de la planète pour être « consommés » à l’autre.

Combien compte-t-on de produits dérivés du pétrole, y compris en sous-produits et débris? Et autres jongleries invraissemblables? Remarquons en passant cette fascinante découverte ô combien efficace qu’elle en est devenue scabreuse! En tentant l’exercice inverse, en retranchant ces produits, il apparaît plus difficile encore d’évaluer ce que nous sommes par rapport à lui, c’est-à-dire que nous sommes ses effets. Arrivés à ce point l’on sait tous que toute chose que nous absorbons est produit au prix d’une consommation de pétrole difficilement calculable: machines agricoles, engrais,…Travailler à la main et labourer en tenant la bride ou le harnais d’un cheval de trait devient rare dans l’agriculture industrielle ultraproductiviste.

Dans l’attelage moderne que voyons-nous: bitume des routes, carburant, pneumatiques, composants du véhicule et fabrication, bouteilles d’eau tant en contenu que contenant, même les produits bio sont sous emballages plastiques, paquetages et emballages, portable et canettes en alu, produits à bronzer ou à moustiques, médicaments, poteaux indicateurs et marquage routier, sandales en simili-cuir et slips de bain, revues en quadrichromie et game-boy, GPS et radards, particules dans l’air qui se respirent, et tout le bazard…A creuser au plus profond tel un archéologue d’ici quelques siècles, l’empreinte humaine qui marquera cette civilisation perdue sera plastique et gluante. Bon, avant de prendre la route en cette saison de voyages penser 3 secondes à la pompe que pour l’heure tant qu’il est à bas coût, nous vivons la vie du pétrole. Attention aux accélérations!

Nous y sommes tellement proprement englués qu’en quelque sorte nous sommes nous-mêmes ces plages engluées. Quant à la production d’agro-carburants l’on sait combien elle est vorace en combustibles fossiles et terres fertiles. Bonjour l’alternative! Attends! comment par ailleurs mesurer le choc produit par cette prise de conscience qui pend au nez? ça risque d’être violent! Ré-apparaîtra alors une nouvelle vision, l’ascèse, la solidarité, la politesse et le respect entre les personnes et la créativité, par…nécessité vitale! C’est pas si mal après tout! Oui, mais plus tard, beaucoup plus tard! Après.

« Oui d’accord! mais dans ton cas, comment tu comptes être fourni en bitume? faudra t’y colleter mon vieux! » Bah! la suite? Oh! de toutes les manières il faudra bien acheter ce qu’il faut, donc se soumettre finalement plastiquement à leur condition financière, la concurrence là-dedans il n’y en a pas. Alors…

D.D


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