Réchauffement et extractivisme. N°750
Écrit par D.D sur 31 août 2016
C’est clair, il y a urgence : « 2015 a battu tous les records; chaque mois qui passe est le plus chaud jamais enregistré, et 2016 battra 2015. » Ainsi près de neuf mois après la signature de l’accord de Paris sur le climat, Laurent Fabius, dans une tribune publiée par Le Monde, tire la sonnette d’alarme. (lire ici, et voir là).
La chimère peine donc à s’animer. Après la COP21, à l’heure où le combat pour laisser sous terre 80 % des réserves d’énergies fossiles doit se renforcer, le constat est dur et sans appel…. la production de marchandises est exponentielle.
Et dans ce processus de fuite en avant au service d’un capitalisme sauvage, comme les deux faces d’une même pièce le bouleversement du climat a partie liée avec la quête sans fin des «ressources naturelles» -70 milliards de tonnes qui doivent être fournies aux chaînes de production et de consommation de marchandises. Autrement dit le pillage de la planète.
Pour alimenter la mégamachine produisant toujours plus d’inégalités et de gaz à effet de serre (GES), la nature sous toutes ses formes y passe – terres, eau, forêts, sous-sol (énergies fossiles, métaux), mer – et sur la planète entière. L’emballement de la production de marchandises s’accompagne d’un accroissement lui aussi exponentiel de l’activité extractive. Forages pétroliers et gaziers au milieu de la jungle ou en pleine mer, roche fracturée en grande profondeur pour extraire des hydrocarbures de schiste, fleuves déportés de leurs lits, forêts, terres et villages inondés pour produire de l’électricité, etc.
Un livre essentiel, talentueux, solidement documenté de plus de 350 pages, publié par les éditions Le Passager clandestin, présente une somme d’informations sur ce sujet: « Extractivisme. Exploitation industrielle de la nature: logiques, conséquences, résistances. »
Admettons qu’un tel titre en « isme » n’attire pas forcément le lecteur. A ce propos voyons ce qu’en écrit son auteur, la journaliste indépendante Anna Bednick: « un nom commun: « extractivisme », dont la définition la plus courte et la plus générique serait l’intensification de l’exploitation massive de la nature, sous toutes ses formes« . « Plus aucun lieu aujourd’hui ne semble à l’abri du système industriel et marchand. »
Projets miniers, pétroliers, grands barrages hydroélectriques, monocultures agricoles ou forestières se multiplient sur tous les continents. Anna Bednik nous alerte: au-delà de l’environnement et des écosystèmes, tout ce qui touche au collectif et à l’intime est menacé par la prédation. L’industrie reste friande des métaux classiques, mais jette désormais son dévolu sur les métaux high-tech. Pour leur contrôle, tensions et guerres prennent le relais de la recherche technologique. Y compris pour le sable des marchands de sable à bâtir les maisons (lire ici).
Mais la journaliste ne s’arrête pas à un état des lieux de la folie extractiviste des sociétés (surtout) occidentales, nourrie par les grandes compagnies privées de l’énergie, de l’agro-industrie, de transports et d’infrastructures, elle nous amène à la rencontre de celles et ceux qui résistent en défendant des « espaces pour être » et construisent une alternative. « La construction ou l’approfondissement de cette « culture de territoire » conduisent à développer et à renforcer, par-dessus tout, des pratiques collectives d’autonomie créatrice ».
A ce titre, ajoutons à sa liste le collectif breton Douar Didoull « Pour la préservation de notre terre et contre le projet minier » dit de « Lok-Envel » (région Rostrenen, Plélauff…).
Ainsi que la mobilisation du collectif « Peuple des dunes » contre l’extraction du sable coquillier en baie de Lannion, qui vient d’être autorisé par la préfecture. Ceci au profit du seul intérêt privé de la Compagnie Armoricaine de Navigation (CAN) filliale du groupe malouin Roullier. Autorisation qui permettrait d’extraire « 400 000 m3 de sable coquillier par an sur une période de 20 ans, soit au total 8 millions de m3, d’une dune sous marine située à moins d’un kilomètre de deux zones classées Natura 2000 (dont celle de la réserve des sept îles, sanctuaire d’oiseaux marins) » (lire ici).
D.D
Ce qui s’est écrit et dit ici-même autour du réchauffement climatique :
–La COP 21 ou requiem pour l’espèce humaine;
–Ainsi s’ouvre le sommet;
–La Cop 21 ou Requiem pour l’humanité, suite ( les attentats à Paris );
-Reportage sur la mobilisation citoyenne.
– «Elégie pour l’Arctique»