Maram Al Masri . N°693

Nous continuons d’ouvrir nos colonnes -comme cela se dit pour la presse papier- aux poètes pour mieux les connaître . Parce que les raisons d’espérer sont rares en provenance de Syrie, je propose cette semaine, de la poésie… franco-syrienne. A savoir celle de Maram Al Masri.

Nulle envie d’en remettre une couche de description de la barbarie que connaît ce pays, la Syrie (4 années de guerre civile). Entre le régime de Bachar el-Assad et les décapitations, les appels au meurtre et les exactions perpétrés par les bandits djihadistes.

Par contre, l’envie d’alerter sur le sort des migrants et particulièrement des réfugié(e)s syrien(ne)s, proies faciles du business mortifère des passeurs -selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), il y a désormais plus de quatre millions de réfugiés syriens dans le monde. « C’est la plus grande population de réfugiés pour un seul conflit en une génération », souligne le Haut-commissariat. En comparaison, c’est presque l’Irlande! Ces réfugiés sont partout. Donc aussi à Rennes . Alors, cette chronique-ci n’est finalement qu’une suite à celle-là.

Parce que l’avancée de l’Etat Islamique continue en Syrie, malgré les frappes aériennes qui devaient tout résoudre si facilement selon tant d' »experts militaires » au journal télé ou radio, alerter ! Et puis, parce qu’à  juste titre, dans son livre « Qui est Charlie? » Emmanuel Todd revient page 200 sur la tentation française d’une intervention militaire contre le régime syrien. « Nos autorités ont alors soutenu bruyamment les forces qui ont fini par engendrer l’Etat islamique. (…) Nous n’avons pourtant toujours pas entendu la moindre autocritique du gouvernement français pour sa complaisance passée envers l’islamisme le plus dangereux. » S’en rappeler!

Alors saluons cette poétesse-ambassadrice non-officielle du peuple syrien et solidaire des réfugiés syriens, tel qu’elle s’énonce le 19 juin dernier sur sa page Facebook:

« Je suis humaniste. L’humanité est ma joie et ma souffrance.
Les rapports d’injustice qui dominent la société, entre riches et pauvres, entre forts et faibles, femmes et hommes…
Mon grand espoir c’est d’ouvrir toutes les frontières et de faire un seul pays ou chacun aurait un salaire minimum tiré de la richesse de la terre pour que les habitants de cette terre gardent la dignité. Et peut-être ça sera une solution pour l’immigration ; car personne n’émigrera de son pays pour une raison économique et si les gens émigrent ceux qui les reçoivent ne ressentiront pas cette hostilité envers l’immigrant ; car si on naît dans un pays par hasard et qu’on jouit de sa richesse, cela ne donne pas le droit d’user de cette richesse sans en faire profiter celui qui par hasard est né dans un pays où il n’y a aucune richesse naturelle…
Bon, c’est une pensée qui a besoin d’être approfondie… »

Sur la même page, il y est retranscript un entretien d’elle pour un journal calabrais: « Moi je dis que j’habite le monde pour l’ironie. Pourquoi? En tant que poète, mon âme est universelle, tout le monde m' »habite ». Moi, je dis que les hommes ont le droit de vivre où ils vont bien, et le devoir des dirigeants est de rendre la vie digne et décent pour leurs citoyens. Chaque fois qu’un immigré fuit, puis meurt dans la mer, il y a aussi quelque chose qui en moi meurt. La chose qui compte le plus, c’est un endroit où je peux vivre bien, d’être avec des gens, qui m’est chère… Et vivre simplement en dignité. »

Puis à cette question: « Qu’est-ce que tu attends de ta poésie, de la vie, par les femmes, par le monde ?
J’offre ma poésie à la vie, au monde, aux hommes et aux femmes. J’aimerais qu’elle soit reçue avec amour, qu’elle donne un autre regard au sentiment, que tu touches et qu’elle ouvre l’esprit… Pour un monde sans souffrance, mais je sais que cela ne sera pas possible. »

A l’occasion de son retour de résidence à la Maison de la Poésie de Rennes, qui s’est tenu en novembre 2010, elle proposa une lecture de ses poèmes par elle-même.

A écouter ici:

D.D