Joëlle Sambi, « Le monde est Gueule de chèvre ».
Écrit par admin sur 15 juin 2019
Des chiffres, des chiffres. Deux, trois, quatre…des chiffres et des morts. 162, … 164 … des morts, des morts par milliers, des morts et leurs âmes ballottées, broyées, bousculées. Elles sont 10.000, d’un bout à l’autre de la terre…10.000 entre ciel et terre. Des âmes en perdition qui errent, noyées, en quête de justice…. Dans ce monde gigotant mon esprit se noie.
Joëlle Sambi, extrait de « Le monde est Gueule de chèvre ».
Je m’appelle Jerry et j’ai 13 ans. Peut-être un peu plus… je ne sais plus très bien. Enfin !
Je m’appelle Jerry, j’ai un métier et je pense avoir 13 ans. Mon travail : compteur de cadavres. Un peu comme papa Diallo compte ses dollars, dans mon cahier, je recense, inventorie, calcule, dénombre, mesure et compte : 162,163…164 ! Aujourd’hui, c’est 164.
Ce qui est certain c’est que 164, lui, ne passera pas l’entrée du paradis. Il est énorme. C’est un pachyderme. « Pachyderme du grec Pakhudermos. Gros mammifère à la peau épaisse de la classe des ongulés. Terme couramment utilisé pour désigner l’éléphant. »
La zoologie j’aimais bien quand l’école tenait encore debout. J’avais des cahiers tout neufs, tout propres, tout beaux. Avec sur chaque couverture un animal : un lion, une girafe, un okapi, un éléphant. »
Auteure, poétesse, slameuse et réalisatrice, Joëlle Sambi est auteure du roman Le monde est Gueule de chèvre publié en 2008.
Entretien autour de cet ouvrage à l’occasion de sa résidence qui s’est tenue en avril-mai dernier, à la Maison de la poésie de Rennes.