« Et si la ville était un océan, et ses bâtiments navires ? » N°1100
Écrit par admin sur 7 juin 2023
Nous ne pouvons jamais parler avec certitude du monde, comme si nous le connaissons déjà, non pas parce que nos hypothèses pourraient plus tard se révéler fausses, ou parce que nos prédictions pourraient sauter, comme diraient les scientifiques, mais parce que le monde lui-même ne s’est jamais stabilisé dans sa structure et sa composition. C’est plutôt dans le devenir continu, comme cela nous arrive en tant que partie. C’est pourquoi le monde, qui est en perpétuelle transformation, est une source constante d’émerveillement et d’étonnement. Nous devrions le vivre avec conscience. «
Tim Ingold, Anthropologie. Repenser le monde, Meltemi, 2020.
Dans la galaxie des auteurs fétiches de la Chronique, chaque auteur est autant une facette d’un écho qu’une résonance du monde tel qu’il est dit « en perpétuelle transformation », vu comme « source constante d’émerveillement et d’étonnement », à « vivre avec conscience. »
Retour alors ce jour sur les traces du socio-anthropologue écossais Tim Ingold, devenu une référence par ses œuvres en anthropologie, archéologie et histoire. Pour une invitation à repenser le monde dans lequel l’homme n’est plus au centre, à l’occasion d’une nouvelle leçon, le 9 mai dernier à Rome, à l’initiative de l’Université et de son département Sciences humaines de l’environnement.
Le texte qui suit se présente comme une courte synthèse de son exposé qui avait pour thème: « Et si la ville était un océan, et ses bâtiments navires ? »
« Et si on essayait de ré-imaginer la relation entre terre et mer ? Et si nous essayions de ne pas penser aux Océans comme des espaces vides, sans frontières ni frontières, par opposition aux continents, aux masses terrestres, bien définies et identifiables ? La mer n’est-elle qu’un miroir d’eau où il est impossible pour les humains de laisser leur marque, ou est-ce pour les marins la condition d’un monde en mouvement ? Et si on essayait d’imaginer la relation entre les deux éléments en termes de chevauchement et de coexistence et non comme deux éléments placés côte à côte ? et si nous pensions à l’océan, tout comme la Terre tout autour de nous, au point que même les bâtiments de la ville doivent être imaginés suspendus dans un monde de flux, avec les vents qui tourbillonnent au-dessus et la terre qui bouillonne en dessous. Est-il possible d’intégrer la mer dans les fondations mêmes de la ville, en rejoignant la ville et la mer ensemble ? Ou pour revenir à la leçon : et si la ville était un océan et que ses bâtiments étaient des navires ?
Plutôt que de vivre dans l’illusion « archipélagique » selon laquelle la ville est érigée sur des îles de solidité contraste avec les mers environnantes, nous devons peut-être imaginer vivre dans ce que le savant Philip Hayward appelle l’aquapelago, une « terre intégrée et aquatique », un espace « qui s’ouvre également à l’air ci-dessus comme il coule dedans, aux graines portées par le vent et aux oiseaux qui ont l’air, autant que la mer ou la terre que leurs habitats naturels. »
D.D
Ce qui a été dit et écrit ici-même autour de Tim Ingold. Ainsi qu’autour de l’ Habiter
FRANÇOISE Sur 8 juin 2023 à 11 h 35 min
Et si l’image que tu montres représentait la ville de Kherson engloutie par les eaux du Dniepr…
Et si ce fragment de La Nef des fous , réalisée vers 1500, rappelons le, par Jérôme Bosch , figurait la folie des hommes bien sûr, toujours, mais aussi ces noyés humains et non-humains qui dérivent lentement vers la mer noire…