Coup de chaud. N°499
Écrit par D.D sur 12 octobre 2011
Trouvé sur le web avant-hier soir: « Voici l’intervention publique sulfureuse de Slavoj Žižek invité à s’exprimer au forum de la « place de la liberté » à 18h, le 9 octobre 2011. L’occupation continue de l’espace public par le mouvement Occupy Wall Street, s’est maintenant répandue dans les autres grandes villes américaines. » En voici la vidéo.
Occupy Wall Street voilà un mois que ça dure. Debout, assis, allongés, jour et nuit, au cœur du « système », sur Zuccotti Park, , rebaptisée « place de la Liberté » à deux pas de Wall Street. Avec campement jour et nuit sur le modèle du mouvement des Indignés espagnol. Paraît que ça fait un demi-siècle qu’on n’avait pas vu ça. Depuis le Vietnam, sans doute. Des Américains en guerre contre une certaine Amérique, celle qui « a volé le rêve américain » ; celle qui dit aux travailleurs qu’« ils n’ont pas droit aux soins, à un logement, à la nourriture » ; celle qui dit aux étudiants qu’« ils n’ont pas droit à un travail et seront endettés jusqu’à la fin de leur vie ». L’Amérique des très riches, le « 1 % de la population qui a détruit la nation et ses valeurs par sa rapacité ».
Mais si des gens expriment leur colère, leur indignation, sur certaines places du monde qu’ils rebaptisent « place de la Liberté », pour d’autres il n’y aurait aucun souci à se faire. Comment ne pas piquer un coup de chaud face à la rapacité des banques ?! Pourtant par ci par là, de ci de là, c’est mou, ça dort. Et ça se voit.
Trouvé sur l’intranet hier matin, par exemple, pour prendre un cas concret, le communiqué du Conseil Général d’Ille-et-Vilaine en date du lundi 10 octobre: « Situation de Dexia : vigilance du Département, mais pas d’inquiétude ». Le texte suit: « La situation de la banque Dexia est à la une de l’actualité. Elle est suivie de près par les collectivités locales, compte tenu de sa position de prêteur traditionnel de ces collectivités. Ainsi, pour le Département d’Ille-et-Vilaine, le montant des prêts de Dexia représente aujourd’hui près de 40% du volume de la dette. Cependant, s’agissant d’un simple prêteur, l’éventuel démantèlement de la banque et la reprise de ses prêts par une autre structure, n’a pas d’incidence pour le Département. Ce dernier, dans cette hypothèse, continuera de rembourser ses prêts auprès d’un autre établissement (…).»
Pas d’affolement ! Dit-il. Les Etats français et belge multiplient les communiqués rassurants. Les collectivités suivent. D’autant plus quand elles sont impliquées. Communiqué qui porte à croire que toutes les garanties sont réunies pour permettre à cette banque ou une autre de poursuivre son activité, d’honorer ses engagements auprès des clients et des autres contreparties bancaires. A ce stade, ils ne peuvent faire autre chose. Il leur faut en urgence rassurer, éviter une panique bancaire et une course des déposants pour récupérer leur argent : en Belgique comme en Turquie, Dexia est une banque de dépôts.
Le krach Dexia ? Premier indice d’un contexte. Car avec la faillite d’une telle banque qui regorge de crédits accordés aux collectivités -voir carte des collectivités touchées, lire la réponse des élus(dans les délibérations de Conseils municipaux, lire « contrat d’ouverture de crédit de Dexia CLF Banque »)-, attention ! ce n’est pas de la gnognotte, alors par effet de domino, c’est tout le système bancaire qui peut s’écrouler. Les banques et leurs dirigeants, créanciers et actionnaires habiles profiteurs de dividendes aux poches profondes, le savent. Et en profitent pour exercer le chantage à l’égard des Etats. Plus même, c’est à une prise d’otages à quoi l’on assiste. La prise d’otages des moyens de paiement. Pas d’argent au distributeur, tout s’arrête ! Pas de quartier !
On apprend donc que La Caisse des dépôts (censée être l’ultime protection de l’épargne des Français) et La Banque postale, les deux seuls établissements financiers publics sont convoqués par l’Etat pour la reprise illico-presto de Dexia. Sur le champ, dans le mélange des genres, à grandes enjambées, dans l’urgence et sans autopsie, pas la moindre précaution sur la qualité des biens transférés, ni des risques de contentieux liés aux crédits toxiques vendus aux collectivités . (voir le communiqué du syndicat Sud PTT).
Bon nombre de maires qui doivent faire profil bas. Démasqués dans leur petit bricolage financier. Mais n’ont pas de soucis à se faire pour le remboursement de leurs emprunts, les contribuables paieront. Inquiétude zéro, donc. Petites choses cependant: les petits épargnants (titulaires de comptes Livret A et CMP) ayant gardé par prudence tranquille leur pécule à La Banque Postale qui se mêlait pas au business paieront , aussi!…Possible même que ceux-ci paieront deux fois, en tant qu’épargnants et contribuables. Banques-pompiers qui à leur tour seront exposées (ex : plus de 100 villes US seraient menacées de faillite en 2011). Mais…
Trouvé à la télé hier soir: en quelques minutes, ce qu’il faudra faire. Nationaliser les banques, qui prennent le crédit en otage. Mais bon dieu ! mais c’est bien sûr ! Et comment, si l’on s’y prend bien, si l’on attend le bon moment, où l’on pourra les ramasser « à la pelle et au petit balai », cela ne coûtera rien aux contribuables. A écouter absolument Frédéric Lordon qui était la télé. Et se délecter de l’exceptionnelle construction de son argumentation. Pourtant, c’est bien de l’économie. Pas du Žižek mais « du Luchini de l’économie ». Jubilatoire!
D.D