Alexandre et Augustin. N°650
Écrit par D.D sur 24 septembre 2014
14-18 aujourd’hui. La grande guerre dans la France contemporaine. Ou la répugnante réalité des faits de cette guerre qui coûtera à l’humanité plus de 10 millions de morts, des millions de mutilés, des centaines de milliers de traumatisés psychiques, des millions de veuves et d’orphelins.
Je ne voudrais pas être gênant mais voici ci-joint en photo les deux frangins de mon grand-père. Natifs de Romillé (Ille-et-Vilaine). L’un s’appelait Alexandre décédé le 22 août 1914 à Virton en Belgique. L’autre Augustin décédé le 30 juin 1916 à Maurepas dans la Somme. Sans combattre. A la Grande Guerre.
Venant tout juste d’arriver sur le front, l’un fut abattu par une rafale de l’aviation allemande qui accueillait l’un après l’autre, en enfilade, les convois français. Pour l’autre, on ignore.
Quant à mon grand-père, touché dans sa jeunesse par la polio, il fut réformé. Bien que ne parlant jamais de ces années-là, ni de ses frangins disparus, pas plus de la guerre qui en a suivi, il a pu cependant me faire comprendre suffisamment la brutale réalité frappant ces hommes désemparés, la peur au ventre de ces enfants au regard éperdu face à la tuerie. La réduction de l’homme à l’état de chose.
Avec ses mots simples qui exprimaient le passage de la vie des anonymes à la chair à canon, il se rapprochait de ceux d’Anatole France « On croit mourir pour la patrie, on meurt pour les industriels ».
A la maison de mon grand-père, deux cadres noirs comportant chacun l’hommage officiel de la République française « Mort pour la France » ainsi que la Croix de guerre, témoignent de leur courte existence sur terre. Ces cadres-là je les ai toujours vu dans le grenier où ils sont encore entreposés, mais tout gosse ils ne m’évoquaient pas grand chose.
Leurs corps n’ont jamais été retrouvés.
D’une certaine manière, cent ans après, ici photographiés, ils revivent. Un peu. Ce doit être possible.
D.D