Jean-Paul Galibert, « La lutte des mots. » N°919
Écrit par admin sur 18 décembre 2019
Les gilets jaunes ont mis quelque chose de neuf dans le mot Champs-Elysées. Désormais, l’obscénité de cet étalage de richesse apparaît mieux dans sa précarité, ainsi que dans sa poreuse proximité aux grands lieux de pouvoir. Ce ne sont que des lieux qu’un peuple peut prendre. Non qu’il le veuille ou qu’il le faille, mais il est souvent nécessaire de rappeler que les mots, c’est l’usage, c’est-à-dire le peuple, qui les fait.
C’est la langue qui juge. Voila pourquoi on peut, on doit agir sur le sens des mots.
Tout récemment, après bien d’autres groupes dans le monde, Extinction Rébellion a déposé une autre couche de sens dans le mot « centre commercial », comme Rémi Fraisse a tragiquement laissé de lui, non seulement à Sivens, mais dans le mot « barrage », et dans le mot « gendarmerie ».
C’est dans les mots que nous jugeons. Voila pourquoi peser sur le sens des mots déplace les jugements, les accords possibles sur les choix, et donc les grandes décisions politiques.
En ces temps si lassants de domination si planétaire du capital, toujours plus mesquinement antisociale ; en ces temps si lassants de désunion, de désillusion et de découragement de tant d’alternatives, il est réconfortant d’imaginer que couve, que rampe une sorte de grande victoire sur bien des mots. Le pouvoir, la phallocratie, le capitalisme, la consommation, se portent bien, certes, mais les mots pour les dire fléchissent, au point qu’il est déjà difficile de les prôner explicitement.
Peut-être sommes nous plus actifs, plus efficaces, et plus victorieux que nous le pensons. »
Jean-Paul Galibert – blog de philosophie imprévisible, le 17 novembre 2019.
Suite à quoi, sur son blog, s’inscrit ce commentaire:
Les mots, c’est en classe qu’on les apprend, et la lutte des classes, c’est par la lutte des mots qu’on la prend. »
D.D
Ce qui a été dit et écrit ici-même autour de Jean-Paul Galibert.