Juste comme ça, « Notre-Dame-des-landes ou le métier de vivre. » N°873
Écrit par admin sur 9 janvier 2019
Brandir la destruction d’une porte cochère en bois, fut-elle celle d’un ministère, comme acte taxé d’hyperviolent, m’a-t-il amené à penser à… Notre-Dame-des-Landes? Je ne saurai le dire. Cela étant, juste comme ça, quitte à donner l’impression de mélanger torchons et serviettes, j’en viens à parler d’un livre édité en fin d’année « Notre-Dame-des-landes ou le métier de vivre« . Qui présente en photos et plans détaillés les cabanes et lieux de vie de la célèbre ZAD.
Ce Notre-Dame-des-Landes ou le métier de vivre livre un témoignage inédit sur les constructions et les modes d’habiter qui y ont été expérimentés. En rassemblant outre les dessins et photographies, des textes et témoignages recueillis en 2016. « Sur la ZAD, on occupe, on habite, on expérimente, on démontre, explique en introduction l’architecte et scénographe Patrick Bouchain, pionnier du réaménagement de lieux industriels en lieux culturels. On a une hypothèse, on passe à l’acte et après on gère. […] C’est toute la démocratie qui est exprimée là. »
Là, le précaire, le spontané, la débrouille, observés par une vingtaine d’étudiants préparant un diplôme supérieur d’arts appliqués, qui ont débarqués sur cette ZAD pour en saisir, par levés de plan des cabanes en vue de leur transcription, l’architecture vernaculaire contemporaine en lutte. Les défis constructifs, dans les arbres, sur l’eau, avec trois bouts de ficelle, etc. des Zadistes n’étaient relevés qu’au moyen d’une combinaison de règles empiriques, d’improvisation imaginative et d’histoires d’utopies à réaliser.
« Pour saisir les situations, nous avions quelques compétences en terme de construction, et un outil majeur dans le domaine de l’observation: le dessin d’architecture, qui sait dire la structure, le détail et la logique des lieux. » Ces plans en témoignent, c’est heureux.
Car, après plusieurs jours d’intervention en avril des forces de l’ordre massives dotées de canons à eau, hélicoptère, blindés, et pelleteuses, ce sont plus de trente fermes, salles collectives, logements qui ont été rasés sur ordre gouvernemental.
Eh bien, à travers le beau graphisme de cet ouvrage au ton sobre, financé en partie par crowfounding, ses auteurs témoignent et rendent compte de ce que racontent ces habitats auto-conçu: une recherche éminemment concrète, vécue et partagée, qui aide à réfléchir ensemble sur nos façons de vivre, d’habiter, et de participer au commun qui nous nourrit. Et qui, dans un contexte très particulier, se définit non pas par ce que ses participants ont en commun mais par leur mise en commun.
Qui, juste comme ça, me refait penser à… une honorable porte cochère « prise d’assaut » par un transpalette électrique (monstrueux d’énergie mettant à mal la République!). Porte derrière laquelle on vit hors sol, pour laquelle je m’amuse à croire qu’aucun plan de détail tiré d’un quelconque relevé au propre des mesures de la menuiserie réputée intouchable, n’a été un jour dessiné comme l’ont été si bien ces « constructions qui semblent bricolées et peu savantes bien qu’elles répondent toutes avec une certaine efficacité aux nécessités qu’elle se sont fixées. » (Christophe Laurens, architecte, paysagiste et enseignant – Notre-Dame-des-Landes ou le métier de vivre).
Retour donc sur 2018, année d’audaces émeutières – multiples et diverses- et d’occupations parsemées, comme en cette ZAD de précurseurs, de formes d’attention à l’autre et à un superbe bocage resté intact à l’heure où par ailleurs la faune française décline massivement – ne serait-ce pas plutôt cela l’acte à taxer d’hyperviolent?… à lire ici.
Une manière courageuse et conséquente de faire face aux changements climatiques en cours, parsemée aussi de poésie et d’ironies: le 17 janvier, C’est férié!, une invitation à la ZAD nous est à tous lancée pour fêter les 1 an de la fin du projet d’aéroport. Qui « restera un événement historique, fruit de décennies de luttes créatives, abrasives et acharnées… » (Les Zadistes).
D.D
Ce qui a été dit et écrit ici-même autour de la ZAD. Et du Chaos climatique.