« Ane bâté ». N°501
Écrit par D.D sur 26 octobre 2011
Alors ça y est. Voici donc la 501ème Chronique. Ce qui signifie que j’inaugure un nouveau long chantier. Vivant, inachevable. Intuitive cette notion de chantier appliquée à cette chronique, à ce site, à la radio, comme à tout je l’avoue, elle est constante chez moi. J’en use quotidiennement. Comme la notion d’atelier l’est aussi. Donc, voilà passé la 500ème le chantier continue ! Et vise le travail bien fait, artisanalement.
Un préalable cependant, clarifions la chose. Il est temps. Voici ce que dit Jean Luc Nancy à propos du nom de chantier :
“Il vient du terme latin tardif de cantherius, que l’on peut rapprocher du grec kanthôn, « baudet », ou de kanthelios onos, « âne bâté », derrière lesquels se trouve sans doute à la queue, en enfilade, une autre langue – et pourquoi pas le gaulois, puisque Plaute qualifie les cantherii de gallici). Cantherius désigne un cheval hongre, c’est-à-dire un cheval châtré pour en faire un animal de charge ou de bât (la Hongrie en exportait beaucoup). Le sens du mot a glissé vers la fonction de support d’une charge, vers le tréteau ou vers le chevalet (autre dérivation similaire à partir du cheval). « Mettre sur le chantier » ou « mettre en chantier » (tout d’abord gantier ou cantier), ce fut donc placer des pièces sur un support afin d’attaquer un travail. De là sont issus les sens à la fois liés et concomitants d’entassement de matériaux et d’ouvrage en cours ou en train, en déclenchement et en opération. Ce type de dérivation s’observe pour d’autres termes, tels que la poutre qui vient du nom d’une jument, ou bien la chèvre et le chevron, ou encore le sommier qui vient de sagmarius, la bête de somme, elle-même de sagma, bas-latin pour « bât ».”
Du coup, si le nom même de chantier provient d’« âne bâté » ça me convient parfaitement. A en être heureux. On va bien s’amuser. Dans la demi-heure j’en toucherai deux mots à Jules (mon âne sans bât) quand j’irai partager avec lui une ou deux pommes comme chaque soir. Très fort sur la reinette du Canada.
Si «mettre sur le chantier» ou «mettre en chantier» c’est donc placer des pièces sur un support afin d’attaquer un travail, alors c’est bien ce à quoi sert ce site. Parfois ça sert de loupiote. Dans l’obscurité. Voire de luciole par dessus le marché.
«Mettre en chantier» oui, bien sûr. Voilà quel beau terme ! Pour ce qui se passe à l’heure de cette 501ème, attelons-nous comme l’éclair de manière à n’être jamais dupe ou floué, donc sans plus tarder à ce «débat démocratique au plan local, national et européen» sur la question de la dette des Etats.
A la prochaine!
D.D
françoise Sur 27 octobre 2011 à 13 h 53 min
Oui, le chantier porte et supporte, « il est le système bâté qui porte le devenir d’un ouvrage, dit encore Jean-Luc Nancy, son opération même, avec ses paniers, ses nacelles, ses poutres, ses palettes, ses étais…. ». Souvent aussi , le chantier va déblayer (étymologiquement encore : déblayer : récolter le blé, enlever la terre), dégager, fouiller puis remblayer…
Puisse ce chantier, bien au-delà de cette 501ème chronique, exister « aussi longtemps que se perpétue un état métastable entre le chaos et un semblant d’ordre, la mise en charge et l’assise trouvée », toujours en « dérivations, transports, retournements, accidents, frottements, débris et signaux indistincts… »